Les panneaux de signalisation bilingues français-breton que l¹on peut voir en Ille-et-Vilaine aujourd¹hui résument assez bien une certaine conception de l¹authenticité de la culture et de l¹identité régionales : la langue bretonne devrait s¹imposer dans le paysage pour rendre évident que les Bretons sont un peuple distinct. Ainsi, bien que l¹on n¹y ait jamais parlé breton, Cesson-Sévigné, commune limitrophe de Rennes, devient-elle Saozon-Sevigneg[xe2][x80][xa6] Les choses se compliquent avec des toponymes de la partie du territoire où l¹on parlait le gallo, variante de la langue d¹oi[u0308]l ; des associations protestent contre cette bretonnisation et se défendent en lançant des pétitions ou en couvrant de bande adhésive les panneaux incriminés. Cet ouvrage présente la structure et la genèse de cette idéologie bretonne, et décrit les formes qu¹elle a prises depuis le premier tiers du XIXe siècle jusqu¹à sa présence aujourd¹hui dans les politiques publiques : en premier lieu, la sauvegarde des langues régionales ; ensuite, l¹entretien du sentiment d¹identité et de communauté culturelles ; enfin, l¹attractivité de la Bretagne, dont langue et culture sont présentées comme les ressorts. Il montre également que la matrice religieuse a joué un rôle dans la constitution du bretonisme, et que celui-ci n¹est pas sans combler le retrait sensible de la religion catholique dans la région. En somme, l¹idéologie bretonne compense par l¹émotion populiste le désenchantement du monde.